Une sélection de livres rares et exigeants pour changer de vie.

Changer de points de vue et de perspectives grâce aux livres

Les livres portent avec eux tous les points de vue de l’humanité. Qui dit différents points de vue, dit aussi différentes perspectives. Quand je dis livre, je dis réflexion et création, transmission de la pensée par les mots. Écrire, c’est poser des idées, des émotions, du passé et des futurs. Et surtout du possible. Lire, c’est le véhiculer.

De quels livres est-ce que je parle ? De tous les livres, essais et fictions. Les parois entre ces deux genres sont poreuses. Parfois, une fiction apportera plus qu’un guide pratique ou un essai de développement personnel. On parle d’ailleurs de bibliothérapie, de ces romans qui peuvent faire du bien, ou nous remuer, en tout cas nous aider à changer notre manière de penser ou de faire. Quant aux essais, ils élargissent nos horizons, nous permettent de mieux comprendre la vie, notre sort, mais aussi ce qu’on lit, ou ce que l’on écrit, que l’on soit lecteur ou écrivain. Les livres existent pour nous rendre meilleurs ou plus conscients, plus sensibles, plus empathiques, plus puissants. Ils créent du lien, ils font sens.

Note : Cet article invité a été écrit par Florence du site Les passagers des mots.

changer de points de vue et de perspectives grâce aux livres

Les essais que je conseille

Sapiens.

Yuval Noah Harari. Albin Michel 2015

livre sapiens Yuval noah harari

Un vrai coup de cœur !

On en a beaucoup parlé, et c’est effectivement un gros pavé dans la mare. Un livre phénomène, indispensable à lire. Pourquoi ? Parce qu’il offre un retour sur notre humanité, dans ce qu’elle a de pire et de meilleur. Elle doit son développement à sa grande flexibilité, sa capacité à communiquer avec un nombre important d’individus. Tiens donc, comme sur les réseaux sociaux ?

L’historien écrit aussi que la création de fictions a permis de créer une culture commune, cimentant nos liens. Voilà de quoi donner aux auteurs du prestige, un rôle non négligeable. Difficile de résumer tout le livre, tellement de points sont traités. Les mœurs de nos ancêtres, l’agriculture, l’extinction de la mégafaune… Biologie, archéologie, histoire, l’auteur nous offre d’appréhender largement le sujet de notre humanité, de placer en perspective notre évolution sur une grande échelle (et nous sommes tout petits !) et de remettre en question certaines de nos croyances. Sapiens n’est pas bien vieux, très puissant, et paradoxal ! 

Ce documentaire passionnant se lit comme un roman, facilement, mais avec du temps devant soi. Une dizaine d’heures à prévoir. D’autant plus que l’ouvrage est complété par Homo Deus, une brève histoire de l’avenir, et un troisième opus, 21 leçons pour le XXIe siècle. J’ai lu les trois avec beaucoup d’intérêt, un peu moins pour le dernier. Je les conseille vivement ! Vous ne regarderez plus l’humanité de la même manière.

Je retiens :

  • L’homme est un destructeur par nature 
  • L’agriculture a peut-être été la plus grande catastrophe de notre histoire.
  • Nous sommes des êtres collaboratifs, à l’intelligence collective (seul, c’est autre chose).

…et je ne suis jamais allé à l’école, histoire d’une enfance heureuse.

André Stern. Ed Actes Sud (domaine du possible), 2011.

Et je ne suis jamais allé à l'école, histoire d'une enfance heureuse André Stern

Le titre est prometteur, n’est-ce pas ? J’ai lu ce livre il y a une dizaine d’années, maintenant, parce que j’avais envisagé de permettre à mon fils de faire l’instruction en famille. Mais cet ingrat récalcitrant, avec un fort esprit d’opposition, a décidé qu’il préférait aller à l’école (alors qu’il n’aimait pas ça). 

André Stern, fils d’Arno Stern, raconte son enfance sans école, sans programme, sans pression. Mais avec enthousiasme et liberté. C’est un témoignage captivant. Un frère et une sœur qui prennent le temps de s’instruire au gré de leurs désirs, de leurs évolutions dans un milieu ouvert et bienveillant. L’auteur a appris beaucoup, avec passion et surtout en profondeur. Tous les sujets et tous les intérêts pouvaient être explorés au bon moment, tout le temps qu’il fallait. La curiosité est naturelle, en éveil, et ne demande qu’à être encouragée.

Cela paraît tellement logique et tellement appétissant ! Mais est-ce que cela peut marcher pour tous les enfants, toutes les familles ? Il faut déjà une certaine liberté d’esprit pour oser aller à contre-courant. Je ne l’ai pas eue, mon fils non plus. Je suis sans doute trop dans le désir de maîtrise, la peur, le doute, affligée par le moule, mais dans l’incapacité de m’en défaire.

Ce que je n’ai pas fait dans la vie, je l’ai testé dans mes fictions. La plupart de mes personnages ne se sentent pas bien à l’école, et s’en passent très bien : Julie Julot dans Miss Rabat-joie, Manon dans Quand tout menace. Erwan et Thomas, dans Le ventre de BK. Dans Grégo de l’île, les rapports à l’éducation nationale sont compliqués, si ce n’est pas à l’enseignement même, c’est aux autres.

En ce qui me concerne, les apprentissages en établissement, c’était violent, de l’ordre de la torture. Aujourd’hui encore, je trouve que c’est de la folie. Alors, lire ce livre, ça me fait rêver, et ça me fait mal aussi, en me disant que tout aurait pu être différent. Peut-on apprendre sans pression, sans violence ? La question reste ouverte. Qu’en pensez-vous ?

Je retiens : 

  • L’enthousiasme qui est et devrait rester notre principal moteur.
  • C’est en se perfectionnant dans ce que l’on aime que l’on peut s’insérer dans le monde professionnel.
  • Apprendre à être heureux devrait devenir une cause nationale.
  • Apprendre et se perfectionner demande toute notre attention, tout notre enthousiasme.

À lire aussi :

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Une société sans école

Ivan Illich. 1971

une société sans école Ivan illich

Sans doute la base, pour qui s’intéresse au sujet. Ivan Illich est aussi un des pères de la décroissance. Par contre, on reste sur une théorie certes passionnante, mais dans une société déjà dépassée (quoi que…). D’autres livres plus récents compléteront la réflexion entamée par l’auteur autrichien.

Tout le monde n’a pas eu la chance de rater ses études

Olivier Roland. Éditions Leduc, 2016.

Tout le monde n’a pas eu la chance de rater ses études

Un gros pavé qui vous fera changer de point de vue, que ce soit sur l’école ou le monde du travail. Cet essai offre non seulement du possible et de l’espoir, ce qui est déjà beaucoup en ces temps sombres, mais aussi des outils pour progresser sur cette voie de l’indépendance.

Personnellement, je l’ai lu bien après avoir pris connaissance des autres livres sur l’éducation ou l’instruction sans école, donc cela a plutôt confirmé mon point de vue. Mais il m’a néanmoins ouvert des perspectives enthousiasmantes, apporté des outils actuels et d’autres savoirs.

Olivier Roland est le créateur de plusieurs Blog, dont Des livres pour changer de vie. Vous y trouverez donc beaucoup d’autres titres pour changer de vie, ou du moins remettre en question votre manière d’être au monde et dans la société.

L’ado (et le bonobo) : essai sur un âge impossible

Nathalie Levisalles. Ed Fayard, 2014

l'ado et le bonobo

Avis à tous les parents d’ado, exaspérés par leur progéniture : lecture indispensable pour mieux comprendre et déculpabiliser. Non, vous n’avez pas forcément loupé quelque chose dans l’éducation de votre tout petit (c’est tellement compliqué l’éducation). Il se passe tout simplement énormément de transformations physiques dans sa vie. Ce qui explique pourquoi il s’affale sur tout ce qui peut ressembler à un fauteuil, qu’il a sommeil tard, sa position à la Gaston Lagaffe (c’est fait exprès pour mieux supporter ce corps en train de grandir)… Et sans doute en était-il ainsi chez Cro-Magnon (remarquez ce lien fabuleux avec les précédents livres cités !).

En abordant cet âge d’un point vu physiologique, on comprend mieux notre enfant, ce qui n’écarte pas quelques pointes d’agacements bien légitimes ! Nous devons savoir que la maturité du cerveau arrive à son terme vers 25 ans. L’anticipation, la coordination et l’empathie se développent en dernier. Passionnant et riche, il faudrait y revenir régulièrement pour tout intégrer. En tout cas, cette lecture peut nous éviter de nous énerver. Elle permet d’entendre que l’ado n’est plus adapté à ce qu’on lui propose. Par exemple, son cycle de sommeil change. Il a sommeil plus tard, et se réveille plus tard. Alors, allez au lycée vers 8 h, c’est une très grande difficulté pour lui. 

Le livre est riche, drôle, facile à lire. On comprend et l’on déculpabilise beaucoup. Indispensable pour tous les parents au bout du rouleau !

Ce que je retiens

  • La physiologie renverse notre éducation, nous ne pouvons pas être responsables (de tout).
  • Les jeux vidéos ne sont pas si diaboliques.
  • L’adolescence dans l’histoire de l’humanité n’a jamais été aussi longue qu’actuellement.

Manuel de transition : de la dépendance au pétrole à la résilience locale

Rob Hopkin, les éditions Ecosociété, 2010. 

Manuel de transition de la dépendance au pétrole à la résilience locale Rob Hopkins

Rob Hopkins, enseignant en permaculture (science systémique qui a pour but la conception, la planification et la réalisation de sociétés humaines écologiquement soutenables), a fondé, à Kinsale puis à Totnes, des villes en Transition. Par la pratique, il tente l’expérience de sortir du pétrole, de rentrer dans un monde durable. Comme dans Sapiens, l’une des solutions les plus efficaces est encore la collaboration, au cœur des villes en mutation. C’est avec la collectivité que nous pouvons avancer. Alors, pourquoi ne pas faire de sa ville un lieu en transition, en permettant à tous ses acteurs de devenir autonomes, capables, solidaires ?

Ensemble, nous pouvons apporter les outils : jardins partagés, monnaies locales, transports doux et limités… Nous avons tous entendu parler de ce que nous devrions engager comme actions, mais souvent nous ne savons pas comment faire.

Si notre communauté adopte ces objectifs, cela devient plus facile pour ses habitants. 

Ce qui me paraît intéressant, chez cet auteur, c’est son enthousiasme. Il nous demande de créer l’avenir que nous voudrions. C’est vrai que nous lisons beaucoup d’essais catastrophiques, ou de dystopies effrayantes, et des rapports déprimants, alors pourquoi ne pas inverser la tendance en imaginant notre futur de manière positive ?

À lire aussi, de l’auteur : 

Et si… on libérait notre imagination pour créer le futur que nous voulons ?

De Rob Hopkins Actes Sud, 2020 (Domaine du possible).

et si... on libérait notre imagination pour créer le futur que nous voulons

Cette fois, ce que je retiens :

  • C’est que c’est à nous d’imaginer le futur, et que la fiction n’est que le possible à insérer dans le réel, le socle de notre avenir.
  • Nous pouvons faire du lien avec les précédents livres cités.

Le livre est-il écologique ? Matières, artisans, fictions

De Association pour l’écologie du livre. Wildeproject, 2020

le livre est-il écologique

Petit essai qui peut compléter celui de Rob Hopkin, pour tout artisan du livre, de l’auteur au libraire, voire même au lecteur. L’industrie de l’édition est à repenser. « Une vitesse nouvelle a gagné les mondes du livre. Une vitesse qui est celle de la machine et qui fait perdre sa valeur au temps long de la création et de la lecture ». Surproduction et pilon ne s’accordent pas avec nos perspectives écologiques. « Chaque année, 1 livre sur 4 reste invendu ; et 15 % sont pilonnés. Dans le même temps, une délocalisation généralisée de l’impression a conduit à la fermeture de 34 % d’imprimeries françaises depuis 2007 ». Quelques acteurs réfléchissent à la transition du livre. Quelques-uns ont même créé quelques fictions pour imaginer un avenir possible. Un essai court qui donne envie de changer les choses, de collaborer à une nouvelle édition.

Pourquoi ça m’intéresse ? Parce que je suis auteur, documentaliste et intéressée par les transitions écologiques. Cependant, le livre est court et j’ai du mal à imaginer ce qu’il est possible de faire en tant que lecteur et écrivain.

Ce que je retiens :

  • C’est encore par le collaboratif que l’on peut changer les choses.
  • L’édition actuelle n’est pas tenable, il va falloir la faire évoluer.

Les fictions que je conseille.

Ceci n’est pas de la bibliothérapie, ni du développement personnel. Mais une suite logique aux livres précédemment cités, une occasion de repenser notre existence.

livres de fiction pour changer de points de vue et de perspectives

Sans hésiter, la première fiction sera :

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À la recherche du temps perdu

De Marcel Proust, de 1913 à 1927.

à la recherche du temps perdu marcel Proust

En 7 tomes, l’auteur nous décrit une vie d’enfant, d’adolescent, puis d’homme dans la société charnière entre le 19e et le 20e siècle. L’écriture de Proust est fabuleuse, mais elle accompagne surtout le déploiement des caractéristiques psychologiques du tout autant insignifiant que grandiose humain. Elle illumine toute la complexité de nos personnalités, de nos vertus, de nos vices, de notre manière d’être au monde, dans l’obscurité et la lumière. L’idée de l’éclairage redéfinit l’histoire, et aide le narrateur à sortir de la caverne où dansent sur les parois des ombres fictives, pour affronter le réel (référence à l’allégorie de la caverne, exposée par Platon).

Les Êtres sont infinis, dit Proust. Effectivement, le narrateur, comme nous-mêmes, ne sait jamais au premier abord ce qui se dissimule sous une action, une réaction, une vie. Il écrit donc le récit des différentes périodes de son existence, selon son point de vue, ce qu’il sait, ce qu’il croit ou comprend. Puis en avançant dans le temps, on sent comme des soleils qui se lèvent et éclairent la partie demeurée dans l’ombre, ce qui permet automatiquement de changer d’idée, de point de vue et donc de perspective.

C’est ainsi que je perçois la vie et les gens. Cela ne fait pas de moi quelqu’un de meilleur, mais plutôt une personne dans l’attente de ce que l’autre peut révéler de lui-même.

Les sagas qui parcourent des décennies offrent souvent ce bouleversement de point de vue. Je pense par exemple à L’amie prodigieuse, d’Elena Ferrante.

L’amie prodigieuse

Elena Ferrante, Gallimard, 2014.

Beaucoup de lecteurs ont déjà chroniqué L’amie prodigieuse d’Elena Ferrante. Cette saga, découverte tardivement, est pour moi un vrai coup de cœur des dernières années. Je me demande souvent à quoi ça tient. Un mélange de style littéraire intrigant et d’intrigue littéraire, d’identification et d’apprentissages (livre cité sur mon article Les vacances d’été, héroïnes de roman).

Pour rappel, nous suivons la vie de deux camarades, des années 50 à aujourd’hui, dans une Italie variée et en mutation, de Naples à Florence, ou de Milan à Turin. Mais de Lila et Elena, qui est véritablement l’amie prodigieuse ? Ces deux petites filles vivent dans un quartier pauvre d’où les études pourront les en sortir. Or une seule pourra s’y accrocher, tandis que l’autre, dotée d’une intelligence hors du commun, évoluera différemment, dans un milieu populaire et violent. Leurs amitiés, leurs amours, leurs passions, leurs défaites tissent un récit de vie captivant, d’autant plus quand on est femme, mère et écrivain.

Il y a quelque chose de proustien, dans cette narration. Elle transporte le lecteur d’une manière non linéaire dans l’existence d’une multitude de personnes qui se croisent, engluées dans leur humanité insatisfaite. Ce qui est analysé à une période pourra être déconstruit plus tard quand un élément nouveau aura fait basculer les théories, les espoirs et les rancœurs. Les points de vue évoluent, se camouflent, s’affichent, s’additionnent afin de nous donner à voir le plus largement possible ces relations complexes qui lient les deux héroïnes, entre bienveillance et jalousie, mais qui lient également tout un quartier, voire un pays. Les dimensions sociale, politique, historique rajoutent de l’intérêt et de la profondeur aux caractères des personnages.

D’ailleurs, je pense à cette image partagée par Elena qui se veut exponentielle, sans limites dans l’espace, alors que Lila vivra ce qu’elle appelle la délimitation, ce floutage des propres frontières de son corps. Apparitions et disparitions participent à ce jeu de cache-cache qui contribue à découdre et reprendre l’œuvre d’une vie. Cache-cache aussi de la part de l’auteur dont on ignore la véritable identité.

J’aime quand on joue entre la fiction et la réalité, et que le fil de l’intrigue est étiré au-delà d’un livre. Un grand nombre de discussions sur les réseaux font suite au tome 4, parce que beaucoup de questions soulevées demeurent en suspens. Est-ce une place laissée au lecteur pour s’impliquer dans l’histoire ? Un récit très important pour moi, sur lequel je pourrais encore disserter longtemps. Il l’est aussi parce qu’une des héroïnes est écrivaine, et que cette volonté pour moi de le devenir également a soutenu toute mon existence. Les romans qui peuvent changer ma vie sont ceux qui m’interpellent sur cette dimension.

Jeune-vieille

Paul Fournel, ed. P.O.L.  

jeune vieille Paul Fournel

Ce roman retrace la vie de Geneviève, jeune fille singulière, amatrice de cinéma, mais qui trouvera un éditeur pour son premier roman, écrit rapidement, sans relecture (et là, ça me fait rêver). Robert Dubois travaille à l’ancienne, passionné, patient, gourmand. Il accompagne notre héroïne qui publie un ouvrage chaque année, traversant, au fil des ans, dans une indifférence manifeste, divers salons du livre (ce qui n’est pas sans me rappeler ma propre expérience, et je me gausse). Elle progresse toutefois, avance assez pour être remarquée par un éditeur plus grand, plus costaud.

Jeune-vieille, surnom trouvé par un camarade de classe, renvoie aussi à une réflexion sur l’industrie du livre, ancienne et moderne, l’écriture à vingt ou à quarante ans, les lecteurs d’hier et d’aujourd’hui. J’ai aimé plonger dans cet univers impitoyable et intéressant du commerce littéraire, et j’ai surtout adoré l’écriture, sensorielle, en chair, solaire. Une langue qui mord ou fait ressentir le pain de mie plein de sable collé au palais.

Il fait partie de trois romans lus en peu de temps où il est question de jeunes auteurs qui réussissent à dénicher un éditeur du premier coup (comment font-ils ??), du processus d’écriture, d’édition, de cette perception littéraire du monde, un monde éprouvé avec des mots. Les deux autres romans sont :

  • Les deux premiers tomes de L’amie prodigieuse
  • Trois, de Valérie Perrin

Des récits sur l’enfance ramenée au présent avec des regards d’adultes qui ont ce pouvoir de mettre en phrases les sensations hirsutes dans lesquelles nous nagions.

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Trois romans avec des similitudes, une écriture propre, un récit accrocheur, des personnages complexes comme je les aime. Et pour vous, est-ce que la prose a autant d’importance que l’histoire ? Voire plus ?

La plus secrète mémoire des hommes

Mohamed Mbougar Sarr. Éd. Philippe Rey/Jimsaan, 2021.

la plus secrète mémoire des hommes

C’est l’histoire de… Mais doit-on forcément raconter l’histoire d’un roman ? Dire de quoi ça parle ? Le héros de notre roman déteste cette question. Il est lui-même écrivain, Africain, vivant en France. Perturbé depuis ses études par un ouvrage atypique, Le labyrinthe de l’inhumain, il part en quête de son auteur, africain également, disparu peu après les polémiques soulevées par son œuvre, en 1938.

Ce livre traite de littérature, mais tout autant de culture, d’histoire, de philosophie, de mémoire, de magie, de l’obscur, de points de vue (oui, on revient toujours au point de vue). Qui lit l’écrivain noir ? L’Occidental ? L’écrivain ? Le philosophe ? Le critique littéraire ? L’Africain ? L’humain ? Qui lit et qui comprend, qui donne sens, et comment…

Ce roman au style travaillé a remporté le prix Goncourt. Je le conseille aux jeunes écrivains, parce qu’il interroge sur la littérature, sur ce qu’est écrire, mais aussi sur la compréhension de ce qu’on lit, des buts des auteurs, de ses attentes, du sens de la formule, des actes à poser, sur l’implication, l’engagement, le rôle… L’histoire est compliquée, étendue dans le temps, avec de multiples conteurs, donc des points de vue, qui se font échos, retours en arrière, pensées, détournements, de mises en abime, d’incompréhension, de jeux de lumière.

Dans le prolongement de Proust ou de Ferrante, intégrer ce livre nous fait progresser dans notre humanité et, si nous sommes écrivains, dans notre métier.

Romans dystopiques et sociologiques :

Le meilleur des mondes

Aldous Huxley (paru en 1932) et autres dystopies.

le meilleur des mondes aldols Huxley

Parmi les dystopies, c’est peut-être celle qui m’a le plus marquée. L’auteur, véritable visionnaire, a anticipé beaucoup d’éléments de notre société actuelle. À force de chercher la perfection, le bonheur, la facilité, nous allons plutôt vers le totalitarisme, la maitrise forcenée, et la perte de l’humanité (lire Homo Deus, en accord avec cette idée).

Les enfants éprouvettes, les vacances de masse, la satisfaction chimique… Utopie ou dystopie ? Partagée en différentes castes, supérieures et inférieures, cette société compte aussi des sauvages, des êtres nés du ventre d’une femme, tel John le Sauvage. Comme dans tout roman, c’est ce décalage qui crée l’intrigue, qui renverse l’ordre établi. L’ordre ici, c’est Ford (Henri), qui n’est pas sans rappeler le mot Lord (seigneur).

Dans la dystopie Pretties, de Scott Westerfeld (série jeunes adultes), on a recours au même procédé. Dans une société sous contrôle, physique, chimique, manipulée, tout semble parfait. Mais des individus ont préféré le camp de la nature, et sont sortis de ce système qui à force de vouloir nous rendre meilleurs épuise la conscience humaine.

Dans 1984, de George Orwell, la maitrise de l’humanité pour l’améliorer est pareillement au cœur de l’intrigue. Une question pourrait nous interpeller : peut-on être heureux sans contrôle ? Notre espèce a-t-elle encore un avenir, en tant que telle ?

Ces fictions nous ramènent aux essais précédemment cités : dans Sapiens, nous sommes des destructeurs en puissance, qui ne prennent pas toujours les bonnes décisions. Et dans Homo Deus, la question de notre futur se pose, de ce que doit devenir l’humanité, entre les surhommes, les plus qu’humains, et les dieux des nouvelles technologies. Doit-on céder nos libertés pour un monde parfait ? La fiction, au fondement de nos collectivités, peut-elle encore améliorer notre condition ?

Pour Rob hopkins, le choix est simple : il faut collaborer et inventer ce monde que l’on veut. L’interrogation est alors : quel monde veut-on vraiment ? Quelles sont les valeurs essentielles ? Quelles fictions devons-nous écrire pour changer le désordre du monde ?

À lire mon article Dystopie : un genre littéraire indispensable.

Les Rougon-Macquart

Émile Zola, 20 romans écrits en 1870 et 1893.

emile zola les rougon-macquart

Le premier livre que j’ai lu, dans cette série (dont le sous-titre est Histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second Empire), a été Germinal, en classe de 3e. Une vraie rencontre pour moi. Sans doute un roman important dans ma préhension du métier d’écrivain. Bien écrire est essentiel, la plume de Zola me captive toujours. Mais la condition sociale et humaine doit nécessairement traverser la fiction, que ce soit dans le fantastique, la science-fiction ou l’historique. Zola décrit une famille influencée par son milieu, par son histoire, plus d’un point de vue physiologique que sociale. 

L’auteur était journaliste et écrivain engagé, avec l’âme d’un scientifique. Il dépeint la condition humaine et psychologique à une certaine époque de notre histoire et inscrit ses romans dans le mouvement naturaliste. De notre point de vue de riche occidentale, on se dit que cette misère c’est bien triste, on n’en veut pas, on n’en veut plus. Mais sommes-nous sortis de la pauvreté ? N’existe-t-elle pas encore ? Quelle société faut-il construire pour s’en défaire ?

Autant la dystopie relate des expériences inventées, mais probables, autant les romans réalistes nous plongent dans du quotidien qui n’est pas forcément le nôtre, mais qui pourrait l’être. Nous sommes humains, de tous les points de vue. 

la comédie humaine balzac

La comédie humaine 

de Balzac (plus de 90 ouvrages écrits entre 1829 et 1850)

Il a aussi pris ce rôle d’éclairer les générations futures en présentant les divers pans d’une société à une époque précise. Pour l’auteur, « un roman est plus vrai que l’Histoire ». L’auteur désire décrire le réel, tout le réel. Montrer ce que la littérature d’alors ne montrait pas, les gens, les strates de la société, les différentes régions, la psychologie d’une classe, voire la psychologie universelle. Il veut aller plus loin que la fiction, la fiction devient essai. Il connaîtra beaucoup de succès avec ces romans qu’il relie entre eux sous ce titre de Comédie humaine, et en faisant intervenir les héros d’un roman à l’autre. C’est une véritable révolution. Zola s’inspire de la Comédie humaine pour écrire les Rougon-Macquart.

Conclusion sur ces livres pour changer de points de vue et de perspectives

ces livres pour changer de points de vue et de perspectives

Les livres, qu’ils soient des essais ou des fictions, possèdent le pouvoir d’insuffler du savoir, de l’empathie, de la compréhension. Ils peuvent modifier notre manière de voir et d’appréhender le monde. Chacun aura son expérience, ses propres lectures, nouera ses propres liens, tissera sa propre conclusion, bien que les conclusions n’existent pas vraiment dans l’évolution d’une société ou d’un être humain. Puisque nous sommes infinis…

En tous les cas, lisez, cela changera forcément quelque chose en vous. Si ce n’est pas votre vie, ce seront vos perspectives, et c’est déjà beaucoup.

Quant aux écrivains, à nous d’inventer le futur.

Recherches utilisées pour trouver cet article :
https://des-livres-pour-changer-de-vie com/changer-de-points-de-vue-et-de-perspectives-grace-aux-livres/
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